A sa sortie chaotique de St-Gale Veteran Center, Jacob s'est retrouvé sur les routes. Déboussolé par les traitements médicamenteux et par un PTSD beaucoup plus marqué qu'il ne veut le reconnaître, le Marine a rassemblé quelques affaires et a décidé de quitter ce maudit pays. Sa liberté temporaire fut entrecoupée par des crises de psychoses plus ou moins catastrophiques et un régime alimentaire à l'image de son surnom. Dans chaque ville où il mettait les pattes, le Grand Méchant Loup semait des cadavres dans son sillage. Pourtant il a essayé. Il a vraiment essayé de résister à ses envies de chair humaine et, à chaque fois, cela se soldait par de fâcheux incidents. Malgré le sang et l'agitation, Jacob réussit à quitter le pays. A peine avait-il atteint la frontière du Canada qu'il sentait enfin les démons du passé lui foutre un peu la paix. Peut être qu'ici, inconnu de tous, pourrait-il repartir de zéro et vivre une vie d'ermite au beau milieu de la forêt et des montagnes? Deux-trois mois s'écoulèrent de nouveau, durant lesquels Jacob avait commencé à se construire une petite routine perdu au milieu de nul part. Le vieux loup avait pour habitude de se lever très tôt et de profiter d'une petite balade dans les montagnes, histoire de voir le soleil se lever en grignotant un petit quelque chose. Autant dire que, tenant à ce rituel de sérénité, Jacob s'était aventuré jusqu'à l'orée de la forêt. Néanmoins, il remarqua immédiatement le bruit inhabituel d'un moteur à quelque vingtaines de mètres. Un vieux fourgon était arrêté, phare éteint mais moteur ronronnant. Conscient de ne jamais avoir vu faire une halte ici, encore moins à ces heures, la méfiance de Jacob fut piquée. Mais ce fut sans compter sur ses vieux réflexes de militaire américain brainwashé qui finirent par le rattraper. Le Marine, curieux et paranoïaque, s'était retrouvé au beau milieu d'une scène de crime. Il ne le comprit malheureusement que trop tard: Lorsqu'il ouvrit les portes arrière du fourgon et qu'il vu trois gamins attachés sur le sol, Jacob avait scellé son destin. Encore sous le choc de cette découverte, il n'entendit pas les brindilles craquer autour de lui. Ce fut alors qu'une douleur vive lui fit pousser un grognement animal. Il porta une main à sa nuque, y arracha vigoureusement la seringue hypodermique qui y était planté puis, à peine l'avait-il observé cinq secondes que des tâches noires se mirent à troubler sa vue. Une, deux, sa carcasse inanimée s'écrasa brutalement par terre, inconsciente. Le Grand Méchant Loup de Ramadi venait de se faire définitivement braconné.